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Trait pour Trait | Christophe Kay : Illustrateur, photographe et explorateur

A la rencontre de Christophe Kay en Arles.

Dans ce nouvel épisode de Trait pour Trait, nous vous proposons de rencontrer Christophe Kay, un artiste arlésien aux multiples talents, un explorateur des temps modernes aux mondes oniriques et fantastiques.

Christophe Kay prend une photo
© Crédit Web13Tv – Christophe Kay en train de prendre une photo en Arles

Christophe Kay, tu te définis en tant qu’illustrateur, photographe mais aussi explorateur, un terme qui m’a beaucoup intrigué, est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

« Effectivement, illustrateur, photographe, explorateur, cela fait beaucoup de choses mais quand je me suis posé la question de savoir à quoi correspondait mon travail ça a d’abord été un problème car nous avons souvent l’habitude  de cataloguer les gens.

J’ai donc décidé de prendre le problème à l’envers en disant : J’ai un univers à partager, je vais donc l’illustrer à ma façon et utiliser différentes techniques.

La photographie est une des techniques principales. Ensuite, l’ « exploration » parce que j’explore mon univers créatif, le partage et les personnes qui viennent voir mon travail l’explore à leur tour et s’explore un peu eux-même par la même occasion.

Voilà pourquoi le mot exploration est si important dans la définition de ce que je peux faire. »

Parlons maintenant de ton art au quotidien. Comment ton processus de création influe ta vie de tous les jours ?

« Je pense que c’est une question qui concerne tous les créatifs : Notre cerveau travaille tout le temps. Dès qu’on est quelque part, on observe, on regarde et ça peut déclencher des idées.

J’ai un petit carnet sur moi ou mon téléphone et si tout à coup je vois quelque chose qui me fait penser à une piste intéressante pour mon travail, je le note. Il m’arrive de relire, d’avoir des notes que j’ai pu faire il y a deux ou trois ans et  me dire : « Oh tiens j’ai pensé à ça c’est un truc de dingue ! faut absolument que tu le fasses » (rire).

Quand je pars en vacances, par exemple, j’ai toujours l’appareil photo avec moi et là où les gens vont prendre en photo les grands classiques dans un lieu touristique, je vais remarquer un détail quelque part et je le photographier.

On peut me prendre pour un fou car je vais prendre en photo la tapisserie plutôt que le buste de l’homme célèbre que tout le monde vient admirer.

Cela a aussi influencé ma personnalité au niveau de ma patience. Il m’arrive de commencer une œuvre et de la terminer deux, trois ou quatre ans après, tout simplement parce que je ne vais pas avoir l’élément nécessaire pour finaliser. Cela apprend à être patient dans le processus de création.

Tes œuvres semblent souvent se placer dans le début du XXème siècle. Pourquoi cette période ?

« J’ai inventé une compagnie d’exploration, la compagnie « Kay Explorateurs ». Elle prend sa source dans les siècles précédents ceux des grandes explorations mais je réinvente cette époque un peu à ma façon : L’idée est d’amener les gens dans un mélange entre présent et passé, de se libérer de notre siècle actuel et de partir explorer justement plus facilement. »

Ce que je trouve fascinant lorsque je regarde tes œuvres, c’est toujours ces paysages oniriques qui peuvent être tout à fait déstabilisants. Pourquoi se placer dans le rêve ?

« Quand j’étais aux Beaux-Arts, je me souviens, on avait des cours d’histoire de l’art et le professeur nous disait : bon voilà tel artiste a voulu dire ceci ou cela.

Parfois, oui, effectivement, on a ce sentiment mais il y a des fois où moi j’avais vraiment autre chose sous les yeux.

Je me disais : Non, moi, je ne ressens pas la même chose et je trouve ça intéressant : Faire en sorte qu’il y ait une alchimie qui se passe à chaque fois que quelqu’un entre dans une de mes œuvres,  lui permettre de rentrer à l’intérieur et d’inventer lui aussi son histoire, cela m’intéresse beaucoup plus.

Et puis, je vais aussi glisser quelques éléments que j’appelle « éléments perturbateurs » qui sont des pistes éventuelles pour amener à une réflexion.

Mais cette réflexion n’est pas téléguidée : Elle va évoluer en fonction de qui va regarder l’œuvre ; La personne qui vient regarder cette œuvre, vient avec sa propre culture, sa propre religion, sa propre éducation et ses croyances enfin tout ce qui va faire sa personnalité.

En proposant ces éléments perturbateurs, la personne va faire une interprétation à un autre niveau peut être de façon très différente.

Ce qui fait que, sur une même œuvre, je peux avoir des gens qui me disent « pour moi c’est le début du monde » ou « pour moi c’est la fin du monde » .

Par exemple et je trouve cela très intéressant, de laisser un terrain de jeu pour l’imaginaire de la personne qui va regarder l’œuvre. »

On retrouve dans tes œuvres toutes sortes de thématiques mais il y en a une qui me semble assez récurrente, c’est celle du vivre-ensemble.

« Je trouve que on est beaucoup plus riche de nos mélanges de quelque nature que ce soit. Notre société tend plutôt à standardiser les choses et à appauvrir l’humain.

Au contraire, on devrait cultiver ses différences et ses richesses et apprendre à les partager et à vivre ensemble.

Donc dans mes œuvres, je vais mélanger effectivement différentes époques, cultures et religions pour essayer d’en faire quelque chose où les gens puissent se dire : « c’est agréable à regarder » et effectivement ce mélange, finalement, il peut être agréable. »

Dans ton travail, tu abordes plusieurs techniques artistiques, il y a la photographie, la composition numérique bien sûr mais tu as décidé aussi d’explorer maintenant la sculpture. Qu’est-ce qu’elle va amener dans ton travail ?

« On parlait au début de technique principale qui était la photographie mais j’ai élargi les champs d’exploration de mon univers à d’autres techniques et la sculpture apporte une nouvelle dimension, une sorte de théâtralité, de mise en scène qu’on peut faire entre les œuvres que je fais à base de photographies, de ses volumes et ses sculptures.

Le travail de graphisme vient aussi se rajouter dans mes explorations : Il y a des véhicules imaginaires que je sculpte. Je dessine les plans de ces véhicules, je les prends en photo et  les mets en scène dans mes créations, donc il y a tout un cercle créatif qui se met en place autour de ces différentes techniques. Elles s’imbriquent les unes dans les autres et donnent vraiment toute une dimension à mon travail. »

Quel est ton rapport aux œuvres ? Est-ce que tu ressens un certain attachement ?

« Dans tout le processus de création, c’est forcément très intime : On converse avec l’œuvre, on s’apprivoise l’un et l’autre. Cette notion de patience dont on parlait tout à l’heure est importante.

Elle me dit parfois : « Là, non, attends, je ne suis pas prête » et moi-même je ne suis pas prêt et puis, à un moment donné, lorsqu’ on va chez l’imprimeur c’est là la naissance physique de l’œuvre et à partir du moment où l’œuvre va naître il y a comme une sorte de séparation : J’accepte qu’elle va avoir sa propre vie à différents plans.

Elle va avoir sa vie d’abord quand le spectateur va la regarder et inventer son histoire  qui ne sera pas  forcément la même que la mienne. Donc j’accepte que cette œuvre puisse accueillir d’autres histoires. Elle va avoir sa vie quelque part, accrochée, et cela me fait plutôt plaisir. »

Christophe Kay, tu nous invites  dans ta compagnie « Kay Explorateurs » à partir à la découverte de tous ces mondes mais où cette exploration va-t-elle nous mener ?

« Mais où cela nous mène ? En étant un peu « coquin », j’aurais envie de dire : « peut-être nulle part » justement. Quand on part en exploration, on ne sait pas vraiment ce qu’on va trouver, on sait dans quelle direction on part mais pas ce que l’on va rencontrer, c’est là tout l’enjeu. Donc je crois que ce qui est important c’est le chemin ou les chemins qu’on va emprunter pendant cette exploration, et être attentif à ce que l’on va partager ensemble pendant cette exploration, ce que l’on va découvrir sur l’œuvre ou sur soi-même sans forcément  atteindre un but… En tout cas je n’en fixe pas forcément. »

Retrouvez notre précédent Trait pour Trait avec Richard Lesage

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